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« Pour une Suisse romande où il fait bon respirer »


« L’auteur accepta la plupart des suggestions de Philip Morris, et lorsqu’il envoya à la compagnie la copie finale de l’article, il avait supprimé sa conclusion originale concernant les effets de la fumée passive sur les enfants en bas âge. »

Selon la revue Pediatrics, Philip Morris aurait payé des chercheurs pour cacher le lien entre la fumée passive et la mort subite du nourrisson

7 mars 2005 - Dans son numéro de mars 2005, la revue médicale Pediatrics publie une étude qui révèle comment les compagnies de tabac ont essayé, au cours des années récentes, de discréditer les résultats scientifiques établissant le lien entre l’exposition à la fumée passive et la mort subite du nourrisson, en faisant paraître des articles scientifiques payés par elles et dont elles orientaient les résultats.

Un des principaux articles en question, « sponsorisé » par Philip Morris et publié en 2001 dans une revue réputée de pédiatrie, nie la validité des travaux de recherche ayant établi un lien entre l’exposition à la fumée de tabac ambiante et le syndrome de mort subite du nourrisson (MSN). Cet article a été cité dans au moins 19 autres articles scientifiques, induisant ainsi en erreur les médecins, leurs patients et les chercheurs, sur les risques que comporte l’exposition à la fumée passive pour un enfant en bas âge.

L’analyse des documents internes de Philip Morris montre, selon les auteurs de l'étude de Pediatrics, que la compagnie a recruté et payé un auteur pour écrire un article destiné à être publié dans une revue scientifique, qu’elle a orienté la rédaction de cet article et a proposé d’en modifier les conclusions dans le but de remettre en question les études publiées précédemment, qui établissaient un lien entre la fumée passive et la mort subite du nourrisson.

Les documents internes du cigarettier mettent en évidence que cet article s’inscrivait dans un plan stratégique général élaboré par la compagnie pour contrer les résultats qui s’accumulaient sur la relation entre l’exposition à la fumée passive et la santé des enfants. Un des documents énonce ainsi le critère devant permettre à Philip Morris d’ « évaluer l’impact » de ce plan : « Doit fournir les éléments scientifiques nécessaires pour une politique qui rende acceptable de fumer dans l’entourage d’enfants. »

L’article admet certes que fumer pendant la grossesse met en danger le fœtus, mais il jette le doute sur les résultats scientifiques publiés auparavant, qui montraient que la fumée passive augmente sérieusement le risque de mort subite du nourrisson – résultats qui avaient pourtant été confirmés dés le début des années 90 par les plus hautes institutions (par exemple, en 1992 par l’U.S. Environmental Protection Agency).

Les documents internes montrent qu’à au moins deux reprises, l’industrie du tabac a utilisé des chercheurs pour écrire des articles remettant en cause le lien entre la fumée passive et la mort subite du nourrisson. La première tentative n’a pas réussi à susciter l’intérêt d’une revue scientifique de renom. C’est alors que Philip Morris a engagé un consultant en lui demandant d’écrire un article de synthèse passant en revue tous les facteurs de risque de la MSN. Les documents montrent que Philip Morris avait inscrit à son budget entre 50'000 et 100'000 dollars pour ce projet.

Ces documents révèlent un effort concerté de Philip Morris pour influencer le contenu et les conclusions de cet article. Après en avoir rédigé la première ébauche, l’auteur l’envoya à la compagnie de tabac pour relecture. Les conclusions de cette première ébauche indiquaient que l’exposition à la fumée passive augmente le risque de MSN. Un haut dirigeant de Philip Morris remit en cause cette conclusion. L’auteur accepta la plupart des suggestions de Philip Morris, et lorsqu’il envoya à la compagnie la copie finale de l’article, il avait supprimé sa conclusion originale concernant les effets de la fumée passive sur les enfants en bas âge.

L’article publié mentionne le soutien financier de Philip Morris, mais n’indique pas qu’il avait été produit et conçu dès le départ à l’initiative de la compagnie, qu’il avait été révisé par la compagnie, et que son contenu et ses conclusions avaient été modifiés pour refléter les vues de la compagnie.

Le professeur Stanton Glantz, un des co-auteurs de l’étude publiée par Pediatrics, a déclaré : « Notre étude montre que l’industrie du tabac continue d’utiliser ses stratégies vieilles de 50 ans pour semer la confusion au sujet des dangers réels de la fumée passive et pour fausser la recherche. Philip Morris ne renonce pas à des manœuvres occultes pour saboter la crédibilité des mises en garde concernant la santé qu’elle-même affiche sur son propre site Internet. »

Le professeur Glantz et ses co-auteurs en appellent aux chercheurs indépendants et aux universités pour qu’ils renoncent définitivement à accepter de l’argent de l’industrie du tabac pour le financement de leurs travaux. « L’industrie du tabac s’est distinguée au cours des 50 dernières années par sa tendance persistante et systématique à la manipulation du contenu et de la présentation des résultats scientifiques. Les travaux publiés avec son argent doivent être considérés avec la plus grande méfiance. »

En Suisse, l’exposition au tabagisme passif provoque chaque année la mort d’environ 40 nourrissons.(1)

(1) Paul Bouvier, Danielle Lecomte, André Rougemont. Position ventrale de sommeil et autres facteurs de risque du syndrome de mort subite du nourisson: Une étude de prévalence à Genève Soz.-Präventivmed. 42 (1997) 121-127.)

Source:


(Dossier 05-013 - 2005-03-07)



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